Daily report for 24 February 2022
UNEA-5.2, OECPR-5.2 and UNEP@50
Ce jeudi 24 février 2022, les délégués participant à la session de reprise de la 5e réunion du Comité à composition non limitée des représentants permanents (OECPR-5.2) ont engagé des discussions effrénées pour tenter de dégager un consensus sur les résolutions qui leur ont été soumises. Lors d’épuisantes réunions s’enchaînant les unes sur les autres, débordant sur le temps du déjeuner et jusqu’à tard dans la soirée, ils se sont attaqués à des questions concernant la gouvernance de la pollution plastique, les produits chimiques, la relance verte et l’économie circulaire, et la biodiversité et les solutions axées sur la nature.
Groupe de travail 1
Cluster 1: Guidés par le Co-Facilitateur Robert Bunbury (Canada), les délégués ont discuté du projet des Co-Facilitateurs concernant un instrument international juridiquement contraignant (IJC) relatif à la pollution marine [dans le milieu marin]. La FÉDÉRATION DE RUSSIE, l’ALGÉRIE et d’autres ont soutenu le nouveau texte proposé par la PALESTINE autorisant la participation des « membres étatiques des agences spécialisées » au groupe spécial de travail à composition non limitée et dans les pourparlers du comité de négociation intergouvernemental (CNI). Les ÉTATS-UNIS et l’UE ont réservé leur position sur ce point.
Concernant la nature de l’accord, les ÉTATS-UNIS, contrés par la FÉDÉRATION DE RUSSIE, ont suggéré que le CNI soit chargé d’élaborer un IJC international « avec des engagements juridiquement contraignants et d’autres non contraignants ». L’EU a préféré parler de « dispositions » et non d’« engagements », ce qui a reçu le soutien des ÉTATS-UNIS du BRÉSIL, et du CHILI. Le PÉROU a suggéré d’utiliser la formulation convenu à Minamata, à savoir que l’IJC « peut inclure des dispositions juridiquement contraignantes et non-juridiquement contraignantes ». La SUISSE, la ZAMBIE, la NORVÈGE, la RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO, la THAÏLANDE, la FÉDÉRATION DE RUSSIE, l’ÉRYTHRÉE, l’ISLANDE, le RWANDA et l’URUGUAY se sont dits favorables à un IJC international, en soulignant que cela comprend par définition les deux types de dispositions, juridiquement contraignantes et non-contraignantes. L’INDE s’est prononcée en faveur de charger la négociation d’un « instrument juridique international » à un CNI.
Concernant l’inclusion d’une référence aux Principes de Rio, l’UE, avec le CHILI, a préféré l’insertion du libellé approuvé dans la décision du Conseil directeur de Minamata, à savoir « la prise en compte, entre autres choses, des principes de la Déclaration de Rio ». La CHINE a demandé des éclaircissements concernant les « autres choses » qui seraient inclues outre les Principes de Rio.
L’INDE a plaidé pour la suppression de la référence à « l’intégralité du cycle de vie du plastique », ce qui a rencontré l’opposition de la ZAMBIE, de la NORVÈGE, de l’URUGUAY, du CANADA, de la RÉPUBLIQUE DE CORÉE, de l’AUSTRALIE, du COSTA RICA, du KENYA, du ROYAUME-UNI, de SAMOA et de la THAÏLANDE.
L’UE a préféré que l’IJC œuvre à « prévenir et réduire la pollution plastique, y compris les microplastiques, dans toutes les catégories environnementales, en particulier dans le milieu marin ». Le CHILI a suggéré l’expression « écosystèmes environnementaux » et le ROYAUME-UNI a proposé « toutes les parties de l’environnement », alors que l’ÉRYTHRÉE et l’AUSTRALIE ont préféré évoquer l’environnement dans son ensemble.
ANTIGUA-ET-BARBUDA, avec l’URUGUAY, le CHILE et d’autres, a appelé à inclure une référence à « l’élimination » de la pollution plastique. Les ÉTATS-UNIS ont noté que chaque mot a une connotation en termes de possibles actions de mise en œuvre, et ont préféré laisser au CNI toute latitude pour décider des mesures spécifiques qui permettront « d’agir » contre la pollution plastique. Le ROYAUME-UNI a préféré le verbe « lutter ».
L’ÉRYTHRÉE a souhaité supprimer l’expression « débris marins », et avec la ZAMBIE, a fait remarquer que la résolution est spécifiquement focalisée sur la pollution plastique.
L’INDE a accédé à fondre son projet de résolution sur le cadre d’action contre la pollution aux produits plastiques, y compris la pollution aux produits plastiques à usage unique avec le projet des Co-Facilitateurs. Les discussions sur ces questions se sont poursuivies dans un format informel-informel.
Cluster 3: Guidés par la Co-Facilitatrice Gudi Alkemade (Pays-Bas), les délégués ont repris les discussions sur la résolution présentée par le Sri Lanka concernant la gestion durable de l’azote. Dans la discussion sur les paragraphes opérationnels, le SRI LANKA a évoqué, suite à des consultations informelles, la suppression d’une référence aux économies monétaires qui pourraient être faites en réduisant de moitié les déchets d’azote. La déléguée a mis en avant une préférence pour la « réduction de moitié » des déchets d’azote d’ici 2030, et l’ARGENTINE, les ÉTATS-UNIS, le JAPON, le CANADA et le BRÉSIL ont insisté sur l’expression « réduire significativement ». En l’absence de consensus apparent sur la « réduction de moitié », les États ont accepté cette dernière option. Les ÉTATS-UNIS ont accepté de garder la référence à « d’ici 2030 » en suggérant d’ajouter « et au-delà ».
Le SRI LANKA a proposé, et le groupe a accepté, de retenir le libellé sur la réduction des déchets d’azote, qui encourage « les États membres à partager l’information relative aux plans d’action nationaux disponibles, en tenant compte des circonstances nationales ». Concernant une référence aux actions confiées à la Directrice exécutive du PNUE, les ÉTATS-UNIS ont émis de réserves quant à soutenir l’élaboration de plans d’action nationaux, en signalant, entre autres, les contraintes financières. En réponse à cela, le SRI LANKA a suggéré d’inclure « en fonction des ressources disponibles ». Au sujet des modalités pour les options envisagées pour une meilleure coordination des politiques, comme prévu dans la Résolution 4/14 de l’ANUE, le SRI LANKA a exprimé sa préférence pour un mécanisme de coordination intergouvernemental sur les politiques relatives à l’azote. Après des discussions entre le SRI LANKA, l’ÉGYPTE et l’ARGENTINE sur la meilleure formulation, les Parties sont convenues d’employer l’expression « entre autres options ».
Au cours de la discussion sur la gestion rationnelle des produits chimiques et des déchets, guidée par le Co-Facilitateurs Mapopa Kaunda (Malawi), les délégués sont convenus d’un texte consolidé proposé par la NORVÈGE et le ROYAUME-UNI, notant que la Gestion rationnelle des produits chimiques et des déchets et la Conférence internationale sur la gestion des produits chimiques (ICCM) comportent un engagement pour le renforcement et le soutien à la réalisation de la cible établie dans le Programme 2030 de développement durable au sujet de la gestion écologiquement rationnelle des produits chimiques et de tous les déchets tout au long de leur cycle de vie. Le BRÉSIL, le CHILI, CUBA et d’autres se sont opposés à la suppression d’une référence à la fourniture de moyens de mise en œuvre pour l’élaboration d’un cadre amélioré pour favoriser la gestion des produits chimiques et des déchets après 2020, proposée par la NORVÈGE et le ROYAUME-UNI.
Le GRAND GROUPE ENFANCE ET JEUNESSE a noté que la gestion rationnelle des produits chimiques et des déchets est une questions transversale et a proposé que la résolution couvre également sur l’identification des produits chimiques toxiques qui sont déjà en circulation.
Groupe de travail 2
Cluster 4: Les délégués ont examiné un texte de préambule revu et consolidé concernant les infrastructures résilientes et durables. Après plusieurs amendements, ils ont pu approuver des libellés abordant, entre autres, le lien entre les infrastructures et les objectifs de développement durable (ODD). Des propositions ont été faites pour supprimer la référence à la Résolution 4/5 de l’ANUE relative aux infrastructures durables, qui encourage les États à élaborer et renforcer des approches stratégiques au niveau des systèmes nationaux et régionaux pour la planification des infrastructures.
Sur les paragraphes opérationnels, au sujet des projets d’infrastructure, les délègues ont abordé la façon de garantir le respect des lois nationales et internationales pertinentes, et d’éviter de causer des dommages environnementaux. La CHINE, contrée par la MONGOLIE et l’ÉGYPTE, a plaidé pour une formulation évoquant la réduction des impacts adverses au lieu de l’expression « causer des dommages ». Le débat a porté sur la pertinence d’orienter le renforcement des capacités et des connaissances vers les économies en transition (BRÉSIL) ou vers les pays les plus pauvres et les plus vulnérables (ROYAUME-UNI et UE).
Le groupe a rouvert les discussions concernant l’économie circulaire, guidées par le Co-Facilitateur Firas Khouri (Jordanie), et a noté le besoin d’établir un équilibre entre l’économie circulaire et les modes durables de consommation et de production. L’UE a également appelé à promouvoir le verdissement des marchés publics et de soutien au transfert de technologies pour renforcer l’économie circulaire. Les ÉTATS-UNIS et l’ARGENTINE ont fait valoir que la façon de mettre en œuvre la responsabilité des producteurs et les législations relatives aux chaines d’approvisionnement demeure incertaine.
Cluster 2: Sous la houlette des Co-Facilitateurs Dragan Ziupanjevac (Serbie) et Sergio Salazar Alzate (Colombie), les délégués se sont réunis pour délibérer au sujet d’une résolution présentée par le Groupe africain sur le lien biodiversité–santé. Concernant les mesures que devra prendre la Directrice exécutive pour assister les États, l’UE, avec le soutien de l’ARGENTINE et du ROYAUME-UNI, a appelé à mettre en exergue l’importance d’une approche intégrée unique sur la santé, à la fois au niveau national et global. Le BRÉSIL a proposé une approche intégrée de santé « parmi d’autres approches holistiques », ainsi que « l’élaboration de vaccins conformément aux obligations d’accès et de partage des avantages ». L’ARGENTINE a proposé, avec le soutien des ÉTATS-UNIS, la suppression d’une référence aux mesures de riposte et au développement de vaccins à partir de ressources génétiques.
Concernant le libellé sur la disponibilité des données, la surveillance sanitaire et les réponses rapides, l’UE, soutenue par la NOUVELLE-ZÉLANDE et le ROYAUME-UNI, a proposé d’encourager les actions ayant des retombées positives sur l’environnement, en tenant compte des liens entre l’humain, les animaux et les écosystèmes. Le ROYAUME-UNI a appelé à instituer des actions qui renforcent la disponibilité, la qualité et l’opportunité des données de surveillance « sans se limiter aux données humaines, pour intégrer également des données relatives aux animaux, au bétail et aux végétaux ». L’ARGENTINE, la CHINE et le BRÉSIL ont émis des réserves sur ce paragraphe, notamment dans un contexte de disponibilité des données et de surveillance sanitaire, dont ils ont affirmé qu’il ne relève pas du mandat du PNUE. La FÉDÉRATION DE RUSSIE a estimé que ces questions devraient être discutées au sein de l’Organisation mondiale de la santé.
Les délégués ont ensuite abordé le libellé encourageant les États membres à intégrer la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité, dans le but d’améliorer la sécurité alimentaire et la santé humaine pour faire barrière aux pandémies sanitaires. L’UE a proposé la formulation « l’éruption de maladies y compris celles ayant un fort potentiel épidémique et pandémique… », ce qui a rencontré l’opposition de la FÉDÉRATION DE RUSSIE. L’ARGENTINE a préféré remplacer « pandémies » par « risques ». La NORVÈGE et le CANADA ont demandé l’ajout d’une référence au bien-être animal en plus de la santé humaine. Le BRÉSIL, l’ARGENTINE et la FÉDÉRATION DE RUSSIE ont proposé « la gestion des espèces exotiques invasives ».
Concernant la sensibilisation concernant les liens entre la perte de biodiversité et la prévalence de maladies zoonotiques, les ÉTATS-UNIS ont suggéré d’utiliser des preuves scientifiques pour clarifier les liens en question. Le CANADA a proposé d’ajouter « les pratiques non durables de production et de consommation et les marchés d’espèces sauvages vivantes ». Le ROYAUME-UNI, contré par la CHINE et le BRÉSIL, a proposé de faire référence aux impacts de la perte de biodiversité tels qu’exposés dans le rapport sur le lien entre biodiversité et pandémie établi par la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES). Le BRÉSIL et l’ARGENTINE ont suggéré un nouveau libellé pour soutenir les États membres dans les activités biotechnologiques relatives à la santé, et pour faire appliquer les mesures de partage des avantages et respecter le cadre d’accès et de partage des avantages (APA). Le ROYAUME-UNI, le CANADA, l’UE et les ÉTATS-UNIS ont réservé leur position sur cette question.
Concernant les mesures de prévention, les délégués ont abordé plusieurs options, dont le renforcement de la fourniture de services écosystémiques en lien à la santé (BRÉSIL), les considérations de santé publique (CANADA et ÉTATS-UNIS), et l’action contre la résistance aux antibiotiques et l’appauvrissement de la biodiversité (UE). Au sujet des risques de santé publique découlant du commerce d’espèces sauvages, l’UE a appelé à mener des contrôles sanitaires appropriées sur la consommation de viande d’espèces sauvages.
Les délégués ont ensuite abordé les paragraphes de préambule concernant le lien entre bien-être animal, environnement et développement durable. Le BRÉSIL a proposé une formulation reconnaissant l’importance de protéger la vie sauvage pour être en mesure d’accomplir le Programme de développement durable à l’horizon 2030. Concernant une référence à l’utilisation non-durable d’animaux domestiques et sauvages comme moteur clé de la triple crise environnementale, l’ÉTHIOPIE a souhaité garder la référence aux animaux le plus générale possible, mais le BRÉSIL, les ÉTATS-UNIS, l’ARGENTINE et le ROYAUME-UNI ont appelé à supprimer le libellé.
Le ROYAUME-UNI a proposé un libellé reconnaissant les conclusions du rapport de l’IPBES sur le lien entre biodiversité et pandémie, selon lesquelles le contact accru entre les humains et les espèces sauvages et le bétail, de plus en plus étroit en raison des activités humaines, augmente le risque d’émergence et de propagation des maladies zoonotiques.
Dans les couloirs
Les répercussions sans précédent de la COVID-19 se font encore sentir partout dans le monde, plus de deux ans après son apparition. Les conséquences de l’appauvrissement de la biodiversité se sont ainsi faites de plus en plus patentes, et sont souvent citées comme le moteur clé de l’émergence de maladies zoonotiques. Sur l’autre face de la médaille, il y a l’évidente question relative à l’étendue des dégâts de la pandémie en matière de conservation de la biodiversité et des services écosystémiques. « C’est véritablement une boîte de Pandore » a réfléchit un observateur chevronné qui se préparait pour les délibérations de l’après-midi concernant deux résolutions : le lien entre biodiversité et santé ; et le bien-être animal. « Voyez les choses ainsi », a-t-il expliqué : « il faut agir sur une large gamme de sujets, les changements d’affectation des sols, la façon de produire du bétail si intensivement, puis il y a le commerce d’espèces sauvages, et les changements climatiques ».
Sur cette toile de fond, les discussions du groupe de travail sont retombées sur les vieux débats habituels mettant en doute la compétence du PNUE pour traiter des questions sanitaires, et plus significativement, se posant la question de faire ou non référence au rapport de l’IPBES sur le lien entre la perte de biodiversité et les pandémies. Sur le front du bien-être animal, le libellé relatif à l’utilisation abusive des animaux domestiques et sauvages comme moteur clé des pandémies n’a pas fait d’émules. En fin de compte, et c’est sans doute plus parlant, il semblait y avoir très peu d’appétit pour une combinaison des deux résolutions à la fin de la session. « Nous n’en sommes pas encore là » a affirmé un observateur expérimenté, « mais il faudra bien y venir à un moment donné ». Un autre participant a souligné que la lutte contre la COVID-19 (et contre celle qui viendra après, quelle qu’elle soit) « doit inclure des actions visant la sauvegarde de la biodiversité et des écosystèmes », pour éviter de futures pandémies avec tous les impacts qui en découlent.