Daily report for 14 March 2015
La troisième Conférence mondiale des Nations Unies sur la prévention des risques de catastrophes s’est ouverte samedi à Sendai, au Japon, en présence d’environ 20 chefs d’Etat et de gouvernement, de nombreuses délégations de pays et de 8000 participants. Le Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, le Premier ministre du Japon, Shinzo Abe, et de nombreux autres dignitaires se sont adressés à la conférence. Les États membres se sont engagés dans un échange de vues, toute la journée, de nombreux délégués y exprimant leur espoir et leur intention que la Conférence produise un résultat solide concernant le cadre post-2015 relatif à la prévention des risques de catastrophe (PRC).
L’après-midi a vu se dérouler un dialogue de haut niveau de partenariat multipartite sur la mobilisation du leadership des femmes dans la PRC et plusieurs séances de travail sur des thèmes tels que les risques technologiques, le transfert des risques de catastrophe et l’assurance, et les engagements en faveur de la sécurité dans les écoles.
Les délégués ont décidé de former une grande commission pour négocier et finaliser le projet de cadre post-2015 relatif à la PRC. La Grande Commission s’est réunie l’après-midi.
LA CEREMONIE D’OUVERTURE
Le Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a souhaité aux délégués la bienvenue à Sendai, soulignant leur rôle important dans la réalisation d’un cadre post-2015 pour la PRC.
Les délégués ont élu par acclamation, Eriko Yamatani, ministre d’État à la gestion des catastrophes, Japon, en tant que président de la conférence. Yamatani devait ensuite recevoir l’empereur Akihito et l’impératrice Michiko du Japon, sur le podium, où ils ont écouté plusieurs allocutions d’ouverture.
Yamatani a salué les progrès accomplis durant la décennie qui a suivi la deuxième Conférence mondiale sur la prévention des catastrophes qui a adopté le Cadre d’action de Hyogo pour la période 2005-2015 (CAH), soulignant sa valeur en tant que guide pour l’action mondiale dans le domaine de la PRC, et ajoutant qu’un cadre post-2015 renforcé est nécessaire pour combler les lacunes.
Ban a déclaré qu’un résultat ambitieux à la CMPRC mettra le monde sur la voie d’un nouveau programme de développement durable en 2015, avec les objectifs attendus de développement durable (ODD) et un accord important sur le changement climatique. Il a exprimé la solidarité de la conférence avec les habitants de Vanuatu face au cyclone Pam et a appelé les délégués à construire une vraie résilience en établissant des liens solides entre les pays et entre les communautés.
Shinzo Abe, Premier ministre du Japon, a exprimé son appréciation pour l’assistance apportée par la communauté internationale en réaction au tremblement de terre qui avait frappé en 2011 le Grand Est du Japon, a mis en exergue la notion de «reconstruire en mieux», et a appelé les participants à partager leurs expériences et les leçons apprises, afin de s’accorder sur un cadre post-2015 solide pour la PRC.
Soulignant la nécessité de nouvelles mesures visant à traiter, en même temps, la PRC et le changement climatique, Laurent Fabius, nouveau président de la 21e session de la Conférence des Parties à la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC COP 21), a lancé un appel pour aider les plus vulnérables à travers un mécanisme "d’alerte pour les catastrophes climatiques". Il a exprimé l’espoir de voir la CdP 21 se traduire par une "Alliance de Paris pour le climat" comprenant un accord universel et différencié, des contributions nationales, des moyens financiers et un «programme de solutions".
Regina Pritchett, représentante des grands groupes, a partagé son expérience de travail avec les femmes de la base dans le domaine du relèvement et de la reconstruction, appelant les participants à se souvenir de leur interdépendance et de prendre le temps de considérer "le tableau entier".
Emiko Okuyama, maire de Sendai, a exprimé l’espoir de voir les expériences de Sendai dans le domaine du traitement des catastrophes être rendues dans les stratégies de PRC adoptées à la conférence.
S’exprimant au nom de Sam Kutesa, Président de l’Assemblée générale de l’ONU, le roi Mswati III du Swaziland a appelé à un renforcement de la coopération et à des partenariats internationaux pour renforcer la résilience, exhortant les délégués à utiliser la CMPRC et les réunions sur le programme de développement pour l’après-2015, à New York , sur le financement du développement, à Addis-Abeba, et la CdP climatique à Paris, comme autant d’occasions pour présenter "une vision unifiée assortie de résultats concrets".
LES QUESTIONS D’ORGANISATION
Les délégués ont adopté, par acclamation, l’ordre du jour de la Conférence (A/CONF.224/1/Rev.1), le programme de travail (A/CONF.224/2) et son additif (A/CONF.224/2/Add.1), et le règlement intérieur (A/CONF.224/3).
Ils ont élu, par acclamation, les vice-présidents de la Conférence, dont un vice-président d’office issu du pays hôte, le Japon, et deux vice-présidents issus de chaque groupe régional: le Bangladesh et la Thaïlande pour l’Asie-Pacifique; la République tchèque et la Fédération de Russie pour l’Europe de l’Est; l’Équateur et la Jamaïque pour l’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC); La Finlande et la Suisse pour l’Europe occidentale et autres Etats (GEOA); et l’Egypte et le Soudan du Sud pour l’Afrique. Ils ont élu Toni Frisch (Suisse) comme rapporteur général.
Les délégués ont convenu de former une grande commission pour faire avancer les négociations du projet de cadre post-2015 pour la PRC. Ils ont demandé aux co-présidents du Comité préparatoire, Päivi Kairamo (Finlande) et Thongphakdi Thani (Thaïlande), de continuer à servir dans les mêmes rôles, au sein de la Grande Commission.
Les délégués ont élu le Bangladesh, le Brésil, la Chine, le Danemark, la Jamaïque, la Namibie, le Sénégal, la Fédération de Russie et les États-Unis pour siéger au comité de vérification des pouvoirs.
ECHANGE DE VUES GENERAL
Shinzo Abe, Premier ministre, au Japon, a annoncé un financement de 4 milliards de dollars en faveur de l’Initiative de coopération de Sendai pour la PRC, mettant l’accent sur le renforcement des institutions, l’assistance matérielle et la promotion de la coopération régionale. Il a précisé qur la PRC "doit évoluer" avec le programme de développement pour l’après-2015.
Plusieurs délégués de haut niveau, dont le président du Kenya, Uhuru Kenyatta, et le président du Zimbabwe, Robert Mugabe, ont souligné les liens entre les discussions et les négociations internationales sur la PRC, le financement du développement, le changement climatique et le programme de développement pour l’après-2015. Les Conférenciers ont partagé leurs expériences nationales dans les domaines de l’élaboration de stratégies de PRC et la promotion de la coopération régionale, comme la coopération de cinq Etats de la région de la mer Caspienne, mentionnée par le président du Turkménistan Gurbanguly Berdimuhamedov.
Dans le sillage de la dévastation causée par le Cyclone Pam, le président du Vanuatu, Baldwin Lonsdale, a informé les délégués que, dans son pays, près de 260 000 personnes pourraient être affectées et a lancé un appel à l’aide.
Han Seung-soo, envoyé spécial du Secrétaire général des Nations Unies pour la PRC et l’Eau, a reconnu les progrès accomplis dans les systèmes d’alerte précoce et dans la préparation aux catastrophes, mais a averti que le manque de capacités, dans les pays en développement, limite encore leur aptitude à faire face aux catastrophes. Il a noté que, dans les 30 dernières années, les coûts estimés découlant des catastrophes se sont élevés à 3,5 billions de dollars, et a conclu en déclarant que «le développement durable doit commencer à Sendai".
LA GRANDE COMMISSION
Les délégués ont examiné le projet de texte au cours d’une séance informelle tenue dans l’après-midi, et s’y sont concentrés sur le préambule.
S’agissant du bilan des catastrophes survenues durant la période 2005-2015, les délégués ont décidé de remplacer la référence aux «groupes vulnérables» par une référence aux «personnes en situation de vulnérabilité".
Au sujet d’une référence aux motifs sous-jacents des risques de catastrophe, ils ont convenu de se référer plutôt à la «faiblesse des dispositions institutionnels» qu’à la «mauvaise gouvernance» et de mentionner séparément, la nécessité d’une «gouvernance renforcée» à différents niveaux.
Au sujet de l’accès limité à la technologie, comme moteur de risque, un pays a fait part de sa préoccupation quant au risque de voir la formulation saper les régimes de propriété intellectuelle, tandis que d’autres ont dit que la préoccupation n’avait pas lieu d’être et que le libellé n’était que descriptif.
Les délégués ont examiné une référence aux "situations de conflits et d’occupation étrangère" en tant que moteurs de risque, certains pays disant que le conflit est une question politique qui doit être traitée dans d’autres instances, et d’autres craignant de voir l’absence de cette référence rendre la réalisation des objectifs post- 2015 de la PRC, plus difficile à concrétiser.
LE DIALOGUE DE HAUT NIVEAU SUR LE PARTENARIAT
Mobiliser le leadership des femmes dans le domaine de la PRC: Riz Khan, présentateur de nouvelles, a modéré la séance. La co-présidente de la session, la sénatrice Loren Legarda, Philippines, a souligné le nombre disproportionné de femmes touchées par des catastrophes, ces 10 dernières années, et le co-président Sanae Takaichi, ministre des affaires intérieures et des communications, Japon, a mis l’accent sur les connaissances et la sagesse dont ont fait preuve les femmes face au tremblement de terre qui a frappé le Japon en 2011.
Shinzo Abe, Premier ministre, Japon, a déclaré que les femmes sont souvent en première ligne en cas de catastrophe, faisant étant du nombre croissant de femmes servant comme pompières, comme opératrices de centres d’évacuation et comme premières intervenantes en cas de catastrophe à la maison.
Les conférenciers ont souligné que l’autonomisation des femmes dans le domaine de la PRC est un investissement intelligent avec un bon retour sur investissement, et a appelé à des approches qui, dans les situations d’urgence, fournissent des ressources directement aux femmes. Ils ont signalé l’évidence que la participation des femmes dans la prise de décision, avant, pendant et après une urgence, assurait de meilleurs résultats sociaux pour les femmes, pour les enfants et pour les hommes. D’autres ont appelé le leadership politique à s’assurer de la sensibilité du cadre post-2015 de la PRC à la parité des genres, l’un d’eux soulignant l’importance de la radio communautaire des femmes dans la communication des messages d’alerte précoce.
Les participants ont soulevé des questions telles que la nécessité et l’utilisation de données ventilées par genre pour informer les cibles de la PRC.
LES SEANCES DE TRAVAIL
Risques technologiques - de la prévention des risques à la reprise: Elhadj As Sy, Secrétaire général de la Fédération internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, a modéré la séance.
Izumi Nakamitsu, Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a expliqué comment les communautés font face aux catastrophes nucléaires et technologiques, soulignant la nécessité d’un soutien nuancé et complet aux personnes touchées.
Les conférenciers ont parlé de la gestion des résidus d’uranium au Kirghizistan; des plans pour gérer les risques en cascade découlant des cyclones, des inondations et des sécheresses à Madagascar; de mesures à court et à long termes pour faire face aux catastrophes nucléaires, tenant compte des leçons tirées de Tchernobyl; et des enseignements tirés de l’accident de la centrale nucléaire de Fukushima Dai-ichi. Les participants devaient examiner également le rôle et l’importance de l’engagement au niveau local dans la gestion des catastrophes technologiques, entre autres thèmes.
Transfert du risque de catastrophe et assurance: Arup Chatterjee, Banque asiatique de développement, a modéré la séance. De hauts représentants du secteur public et de l’industrie prenant part à ce groupe de discussion ont présenté des exposés sur la façon dont des approches de partenariat entre les secteurs public et privé, qui engagent le secteur de l’assurance et de la réassurance à tarifer le risque, aident à la réalisation d’une riposte et une prévention efficaces face aux catastrophes. Ils ont également souligné le potentiel de la coopération entre les secteurs public et privé pour augmenter les niveaux de pénétration de l’assurance, en cas de catastrophe, et d’assurer la subsistance à la suite de catastrophes importantes. Les membres du groupe de discussion ont mis en exergue l’assurance en tant qu’élément essentiel du programme de PRC qui doit prendre une plus grande importance dans le cadre de l’après-2015. Les participants ont demandé au secteur de l’industrie de concevoir des produits d’assurance abordables pour les secteurs vulnérables.
Réunion de haut niveau des Nations Unies: Achim Steiner, directeur exécutif du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), a modéré cette séance qui a discuté des priorités de la PRC dans le contexte du programme de développement pour l’après-2015, organisé par le Comité de haut niveau des Nations Unies sur la haute direction du Groupe de haut rang sur la gestion des programmes de PRC pour la résilience (HLCP/SMG). Le Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a souligné l’engagement du système des Nations Unies à aider les Etats et les communautés dans la promotion de politiques de PRC fondées sur les résultats de Sendai. Affirmant qu’un "financement plus important est nécessaire", Ban a suggéré la prise de mesures telles que le renforcement des communautés vulnérables. Steiner a conclu en soulignant les liens entre le développement et les actions de PRC, et le rapport coût-efficacité de la prévention et de la préparation.
L’Engagement en faveur de la sécurité dans les écoles: Kim Sung-joo, chef de la Croix-Rouge coréenne, a modéré cette séance qui a examiné les initiatives nationales liées à l’amélioration des mesures de PRC dans les écoles, en mettant l’accent sur: la récupération et la réhabilitation; la préparation; la riposte; la prévention; et l’atténuation. S’appuyant sur l’Initiative pour la sécurité dans les écoles dans le monde entier, des pays, dont le Nigeria, l’Iran, les Philippines, l’Indonésie et la Turquie ont mis l’accent sur le renforcement de l’expertise et des programmes nationaux visant à faire avancer les mesures de résilience. Les conférenciers ont souligné la nécessité d’impliquer les communautés locales, les parents, les enseignants et les jeunes, ainsi que l’importance de l’élaboration de plans pour chaque école à travers la tenue d’ateliers et le renforcement des capacités des dirigeants locaux. Kim a conclu en soulignant l’importance des mesures d’alerte précoce, et en invitant les pays à se joindre à l’initiative.
DANS LES COULOIRS
Tout de suite après la cérémonie d’ouverture de la CMPRC, la Grande Commission nouvellement formée a commencé son travail de finalisation du projet de cadre post-2015 pour la PRC, le sentiment dominant étant que le Comité préparatoire de la journée précédente, qui était initialement prévu pour effectuer cette tâche, n’a été finalement «qu’une session de réchauffement". La progression a, toutefois, été lente. Certains ont déploré que les questions qui étaient considérées comme étant réglées dans les discussions précédentes menées à Genève, aient été rouvertes, tandis que d’autres ont affirmé que les libellés encore litigieux ne devaient pas être rendus dans le projet de texte. Néanmoins, les co-présidents étaient de bonne humeur, l’un d’eux annonçant: "Je me sens prêt à résoudre les problèmes difficiles, aujourd’hui" - déclaration que la Grande commission a accueillie avec des applaudissements spontanés, considérant que la présence de tant de ministres à la CMPRC pouvait fournir à la fois l’opportunité et l’impulsion nécessaires à la réalisation d’un accord.